ven. 6 juin 2025
Le blog de Bernard Keppenne : « La BCE proche de la fin de cycle »

La BCE a bien réduit ses taux de 0,25 %, et devrait faire une pause estivale, ce qui ne veut pas dire qu’il y aura une pause pour autant dans les marchés vu les échéances du mois de juillet dans les négociations commerciales.
Position de la BCE
Le taux de dépôt a été ramené à 2 % après la huitième baisse de taux depuis juin 2024, et ce niveau semble, pour la BCE, être un bon niveau pour pouvoir prendre le temps d’évaluer comment les choses vont évoluer.
Comme l’a d’ailleurs déclaré Christine Lagarde, « au niveau actuel, nous pensons être en bonne position pour traverser les circonstances incertaines qui vont se présenter ».
Deux scénarios pourraient se réaliser dans les prochains mois, ce qui explique la pause de la BCE.
Celui d’une baisse des prix de l’énergie qui se poursuit, avec un euro qui demeure ferme, des droits de douane qui plombent les exportations européennes et pèsent dès lors sur la croissance, avec le risque de voir des surcapacités qui viennent peser sur les prix. Un scénario qui pourrait voir l’inflation en zone euro passer largement en dessous de l’objectif de 2 %.
L’autre scénario étant celui de mesures de rétorsion de la part de l’UE qui entraînent une hausse des prix des importations, avec une fragmentation des chaînes d’approvisionnement qui exercent une pression à la hausse sur l’inflation. Un scénario de reprise assez nette de l’inflation.
Devant autant d’incertitudes, pas étonnant que la BCE se soit montrée prudente, le communiqué soulignant que « le conseil des gouverneurs ne s’engage pas à l’avance sur une trajectoire de taux particulière. Les décisions du conseil des gouverneurs relatives aux taux d’intérêt directeurs seront fondées sur son évaluation des perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire ».
Pour ses nouvelles prévisions, la BCE est partie du postulat que « une nouvelle aggravation des tensions commerciales au cours des mois à venir se traduirait par une croissance et une inflation inférieure aux niveaux ressortant des projections de référence ». Tout en ne négligeant pas le fait que « à l’inverse, si un terme favorable est mis aux tensions commerciales, la croissance et, dans une moindre mesure, l’inflation seraient plus élevées que dans les projections de référence ».
Elle table désormais sur une inflation à 2 % en 2025 contre 2,3 % précédemment, à 1,6 % en 2026 contre 1,9 % précédemment et à 2 % en 2027. Et pour l’inflation sous-jacente, elle voit cette dernière à 2,4 % en 2025, 1,9 % en 2026 et 2027.
Concernant la croissance, ses services ont revu ceux-ci à la baisse, avec une croissance à 0,9 % en 2025, à 1,1 % en 2026 et à 1,3 % en 2027.
Le fait que Christine Lagarde ait déclaré qu’avec le niveau des taux actuels, la BCE est en bonne position, le marché a le sentiment que la BCE pourrait bien approcher de la fin de son cycle d’assouplissement.
Résultat, les anticipations de baisse de taux en juillet ont fortement reculé, même si elles n’étaient pas bien élevées, l’euro est resté très ferme par rapport au dollar, et le rendement du Bund 2 ans est reparti à la hausse.
Le scénario d’une baisse des taux de 0,25 % à la rentrée est même remis en cause, et il ne serait pas étonnant de voir la BCE laisser ses taux inchangés jusqu’à la fin de l’année.
Autre baisse de taux
Ce matin, la Banque centrale indienne a abaissé son taux directeur de 0,50 % pour le ramener à 5,50 %, compte tenu d’une inflation qui a considérablement reculé et qui s’aligne à présent sur son objectif de 4 %.
L’inflation de détail a ralenti plus rapidement que prévu au cours des derniers mois et est tombée à 3,16 % en avril, son niveau le plus bas depuis près de six ans.
Si cette décision n’est en rien une surprise, et elle avait fait de même en avril, par contre, elle a annoncé également une baisse de 1 % du taux des réserves obligatoires des banques pour accélérer la transmission dans l’économie de sa politique monétaire.
Croissance qui ralentit
Selon la BNB, et cela n’a rien d’étonnant après la publication de l’enquête qu’elle a publiée cette semaine, la croissance en Belgique pour le deuxième trimestre ne devrait être que de 0,2 %.
Elle estime que la consommation des ménages va rester assez fragile et que si la croissance des investissements des entreprises s’est accélérée au premier trimestre, pour la suite « les fondamentaux tels que l’utilisation des capacités de production restent fragiles et l’incertitude atteint des sommets historiques, ce qui incite de nombreuses entreprises à reporter leurs projets d’investissement ».
Et si les exportations nettes ont contribué positivement à la croissance du PIB au premier trimestre de 2025, en grande partie parce que les entreprises avaient augmenté leurs exportations avant les annonces de hausse des droits de douane, pour le second trimestre, elles devraient être neutres. D’une part, parce que les exportations devraient ralentir, et d’autre part, parce que les importations devraient également ralentir, étant donné que la BNB table sur un tassement de la demande intérieure.
Chiffres aux États-Unis
Cet après-midi seront publiés les chiffres sur l’état du marché de l’emploi aux États-Unis et à en croire les prévisions, la croissance de l’emploi commencerait à sérieusement ralentir.
Si le taux de chômage est attendu stable à 4,2 %, par contre les créations d’emploi devraient être de 130 000 contre 177 000 en avril, mais cela resterait au-dessus des 100 000 emplois nécessaires pour suivre la croissance de la population en âge de travailler.
Le salaire horaire moyen devrait avoir augmenté de 0,3 % en mai contre un taux de 0,2 % en avril, soit un taux annuel de 3,7 % contre 3,8 %.
Source : Bernard Keppenne, Chief Economist - CBC Banque & Assurances