jeu. 6 nov. 2025
Le blog de Bernard Keppenne : « La Cour s’interroge, mais rien n’est encore joué »

Le marché de l’emploi aux États-Unis se montrerait plus résistant que prévu, ce qui a fait remonter les taux obligataires américains, alors que la Cour a émis des doutes, ce qui laisse planer une bonne dose d’incertitude.
Des doutes
Les juges de la Cour suprême des États-Unis ont émis des doutes sur la légalité des droits de douane imposés par Trump.
Doutes ne veut pas dire que la Cour va rejeter les arguments de l’administration Trump, mais le ton a été donné avec les propos du juge en chef conservateur John Roberts, qui a estimé que les droits de douane constituaient « l’imposition de taxes aux Américains, ce qui a toujours été le pouvoir principal du Congrès ».
Pour Roberts, la Cour pourrait appliquer sa doctrine des « questions majeures », qui exige que les actions de l’exécutif ayant une grande importance économique et politique soient clairement autorisées par le Congrès.
Et de préciser « cette justification est utilisée pour justifier le pouvoir d’imposer des droits de douane sur n’importe quel produit, en provenance de n’importe quel pays, pour n’importe quel montant et pour n’importe quelle durée. Je ne dis pas que ce n’est pas le cas, mais il semble qu’il s’agisse là d’une autorité majeure, et la base de cette revendication semble mal adaptée ».
Pour la juge conservatrice Amy Coney Barrett, alors que l’administration Trump s’est référée aux termes de l’IEEPA ( la loi sur les pouvoirs économiques en cas d’urgence internationale), elle a posé la question suivante : « pouvez-vous citer un autre endroit du code ou une autre période de l’histoire où l’expression “réglementer les importations” a été utilisée pour conférer le pouvoir d’imposer des tarifs douaniers ? »
Par contre, pour le juge conservateur Brett Kavanaugh, il a rappelé que le président Richard Nixon avait imposé un tarif douanier mondial en vertu de la loi qui a précédé l’IEEPA dans les années 1970 et qui contenait des dispositions similaires concernant la réglementation des importations.
Il faut maintenant attendre son verdict, et avoir émis des doutes ne veut pas dire que la Cour va donner raison aux plaignants.
En attendant
L’économie américaine résiste et fait même mieux s’il faut en croire l’indice ISM des services qui a atteint son plus haut niveau depuis huit mois.
L’indice ISM est en effet passé de 50 en septembre à 52,4 en octobre, malgré la fermeture du gouvernement et l’imposition des droits de douane.
A propos de la fermeture du gouvernement, le Congressional Budget Office (CBO), organisme non partisan, a estimé que la fermeture du gouvernement pourrait amputer le PIB de 1 à 2 points de pourcentage au quatrième trimestre. Le CBO a estimé que la majeure partie de la baisse du PIB finirait par être récupérée, mais a prévu qu’entre 7 et 14 milliards de dollars ne le seraient pas.

Pour revenir à l’indice ISM des services, sa hausse a été portée par les nouvelles commandes, avec un indice qui est passé de 50,4 en septembre à 56,2 en octobre.
Concernant l’emploi, la situation n’est vraiment pas claire. L’indicateur de l’emploi dans le secteur des services a grimpé de 47,2 en septembre à 48,2 en octobre, mais cela demeure toujours un niveau de contraction de l’emploi.
Alors que le rapport national sur l’emploi publié par ADP a montré que l’emploi a rebondi de 42 000 postes en octobre après une baisse de 29 000 en septembre.
Normalement, ce vendredi, nous aurions dû avoir la publication des chiffres sur l’état du marché de l’emploi, mais fermeture oblige, ces derniers ne seront pas publiés, ce qui entretient l’incertitude. Mais si on se base sur les données d’ADP, la situation ne semble pas se dégrader, ce qui a un peu renforcé le sentiment que la FED pourrait passer son tour en décembre, ce qui a provoqué une petite remontée du rendement du Treasury 2 ans.

Baisse des taux
La Banque centrale polonaise a réduit son taux d’intérêt principal de 0,25 % à 4,25 %, compte tenu du recul de l’inflation.
Elle a déjà réduit ses taux de 150 points de base depuis le début de l’année, et pourrait encore agir en 2026, si l’inflation reste dans ses objectifs.
Le zloty polonais est resté stable par rapport à l’euro après cette décision, profitant toujours d’un différentiel de taux favorable.

Baissera, ou baissera pas ?
C’est la question à un penny avec la réunion aujourd’hui de la Banque d’Angleterre.
Jusqu’il y a peu, la probabilité d’une baisse était quasiment nulle, alors qu’elle est maintenant d’une chance sur trois.
Ce changement est intervenu depuis la publication du chiffre d’inflation qui est resté stable à 3,8 %, alors que l’on craignait une hausse à 4 % en septembre.
Mais une des raisons pour laquelle elle pourrait décider d’attendre la prochaine réunion en décembre est qu’elle disposera des détails sur l’ampleur des augmentations d’impôts prévues dans le budget le 26 novembre, ainsi que les données officielles sur l’inflation et l’emploi pour les mois d’octobre et de novembre.
Le sterling est resté sous pression par rapport à l’euro en attendant le résultat de cette réunion.

Par contre, hier, sans surprise, la Banque centrale suédoise a laissé son taux inchangé à 1,75 % et a distillé un message limpide pour la suite en déclarant « le taux directeur devrait rester à ce niveau pendant un certain temps ».
Ce message confirme sa position exprimée en septembre, qu’elle voyait les taux inchangés au moins jusqu’au quatrième trimestre de l’année prochaine.

Source : Bernard Keppenne, Chief Economist - CBC Banque & Assurances






