mer. 28 juin 2023

En tant qu'investisseur, il vous est impossible de lire un rapport financier sans tomber, tôt ou tard, sur des abréviations que les analystes sortent comme un lapin de leur chapeau. Et même si ces termes ne figurent pas dans ce que vous lisez des analystes, vous devriez certainement vous attardez dessus ; après tout, les mesures d'évaluation telles que le ratio « P/E » ou « EV/EBITDA » fournissent un aperçu concis et utile de l'évaluation d'une entreprise. Ces chiffres vous permettent des comparaisons rapides avec des pairs et même avec d'autres secteurs. Tom Simonts, Senior Financial Economist du Group KBC, fait le point sur les entreprises belges couvertes par KBC Securities.
Le profit ne compte (presque) pas
Le bénéfice net est à peu près la pire façon de déterminer l'évaluation d'une entreprise. En effet, ce chiffre tient compte d'un large éventail d'éléments qui, pour des raisons fiscales ou comptables, masquent la réalité sous-jacente. La meilleure méthode d'évaluation consiste à estimer méticuleusement les flux de trésorerie attendus sur une période de dix ans et à les recalculer à la date d'aujourd'hui. Malheureusement, il s'agit là d'un exercice difficile qui exige beaucoup de perspicacité, de connaissances, de formation et de compétences en matière d'estimation.
EBITDA et EV/EBITDA
Le juste milieu consiste à utiliser l'EBITDA. Ce terme couramment utilisé est l'abréviation de « Earnings before Interest, Taxes, Depreciation and Amortisation ». En français : les « bénéfices avant retrait des intérêts, impôts et amortissements » ou flux de trésorerie d'exploitation. Ce chiffre est calculé en déduisant du chiffre d'affaires déclaré tous les coûts liés aux opérations quotidiennes (frais de personnel, coût des matériaux de base, etc.).
En d'autres termes, l'EBITDA reflète la rentabilité des activités d'exploitation d'une entreprise. L'un des principaux avantages de ce chiffre est sa grande transparence : il est utilisé par toutes les places boursières du monde, ce qui permet de comparer facilement les estimations des différents analystes lors de la publication de nouveaux chiffres trimestriels ou annuels.
Le chiffre de l'EBITDA obtenu est ensuite comparé à la valeur d'entreprise (« VE »). Ce chiffre est constitué de la valeur de marché et de la position d'endettement net. Un ratio VE/EBITDA élevé par rapport à d'autres entreprises indique que les investisseurs sont prêts à payer plus pour cette action, en termes relatifs, que pour d'autres actions.
Cela peut avoir de bonnes raisons, par exemple parce que l'entreprise en question connaît une croissance plus rapide ou a des marges bénéficiaires plus élevées. Mais cela peut aussi être le signe d'une surévaluation. D'un autre côté, un chiffre bas peut indiquer une sous-évaluation (injustifiée ?), bien qu'il puisse également indiquer des marges structurellement faibles ou d'autres problèmes. Il n'existe pas de valeur EV/EBITDA « moyenne », car les différents secteurs sont évalués différemment.
Les entreprises belges et néerlandaises les moins chères
Les tableaux ci-dessous présentent le classement des estimations actuelles de KBC Securities pour les entreprises suivies. Tom Simonts a fait un tour d'horizon des chiffres les plus négatifs vers des chiffres de l'ordre de 6x à 7x. Pour 2023, Galapagos, MaaT Pharma, Inventiva, Sequana, Biocartis, MDxHealth, NX Filtration Hyloris et même argenx figurent parmi les chiffres négatifs. Logique, puisqu'à l'heure actuelle, ces entreprises investissent beaucoup d'argent pour générer des ventes et des bénéfices dans un avenir (proche ?). Les chiffres positifs les plus bas sont ceux de bpost, Econocom, CFE, Euronav, Exmar, Roulara, Sipef et Proximus.

Ne tombez pas dans le piège
Cependant, le ratio EV/EBITDA n'est pas légion. Par exemple, il ne peut être utilisé que pour les entreprises ayant des activités industrielles ou de services. L'évaluation, par exemple, des banques, des assureurs, des sociétés immobilières et/ou des holdings se fait sur d'autres variables, spécifiques à ces secteurs. Les critiques soulignent également (à juste titre) que l'EBITDA ne tient pas compte de la structure du bilan. Une entreprise à forte intensité de capital, par exemple un fabricant de matériaux de construction, doit investir plus que, par exemple, une chaîne de supermarchés et aura donc des amortissements beaucoup plus élevés.
Pour corriger cette différence, il est préférable d'examiner le chiffre de l'EBIT, bien que toutes les entreprises ne le communiquent pas. Enfin, il y a la composition de l'EBITDA : certains coûts sont de nature unique (par exemple, ceux liés à une acquisition importante) et doivent donc être éliminés. On y remédie en publiant un REBITDA : il s'agit de l'EBITDA récurrent, c'est-à-dire l'EBITDA hors coûts exceptionnels.
Ici aussi, cependant, on choisit trop souvent la voie de la moindre résistance : certaines entreprises déclarent chaque année les mêmes coûts non récurrents et tentent ainsi de présenter la réalité sous un jour un peu plus agréable.
Enfin, la vérité d'aujourd'hui est parfois le mensonge de demain. Ou comment les estimations de chaque analyste ne sont elles aussi que des estimations. Sur la base de nouvelles données, les estimations peuvent changer et changeront, ce qui ajustera également le ratio, tant positivement que négativement.
